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Le Ginsénoside Re pour les fonctions cognitives

Dernière mise à jour : 17 avr. 2024

À chaque instant de la journée, que l'on soit adolescent ou adulte, au travail ou chez soi, notre cerveau utilise une palette de capacités qu’on appelle les fonctions cognitives. (1)


Les fonctions cognitives sont les capacités de notre cerveau qui nous permettent de communiquer, de percevoir notre environnement, de nous concentrer, de nous souvenir d’un évènement, ou d’accumuler des connaissances. Elles regroupent différentes notions : la mémoire, l'attention, le langage, les fonctions exécutives et les fonctions visuo-spatiales. (1) (2)


Aujourd’hui, il y a un fort vieillissement de la population avec l’augmentation de l’espérance de vie (en moyenne 79 ans pour un homme et 85 ans pour une femme). Il y a ainsi une accumulation des pathologies liées à l’âge et notamment la déficience cognitive qui impactera jusqu’à 131,5 millions d’individus en 2050. (3)(4) Elle se caractérise par la dégénérescence progressive de la mémoire, de l'apprentissage, de l'exécution, de l'attention, du calcul, de la compréhension ou du jugement. (4)

De nombreux traitements existent pour diminuer les symptômes de ces atteintes cognitives, mais ne sont pas sans impact pour la santé. Il reste intéressant d’explorer de nouveaux traitements naturels pour ralentir l’avancée de ces déficiences, pour prévenir son apparition, ou même d’améliorer ses fonctions cognitives.


Le ginseng appartient au genre Panax ginseng CA Meyer (Araliaceae), est une plante clé de la médecine chinoise grâce à son large éventail d’utilisations thérapeutiques. (5)(6) Cette plante adaptogène est utilisée comme agent nootropique depuis plus de 2000 ans en Chine, et il est largement utilisé en Asie, en Europe et aux États-Unis.(7)(8) De nombreuses études précliniques et cliniques soutiennent les effets bénéfiques du ginseng sur des maladies du système nerveux central et métaboliques. (8)(9)


Ainsi, il est intéressant d’approfondir le sujet sur l’efficacité des molécules actives du ginseng sur les fonctions cognitives.


I. Les nombreux rôles biologiques des ginsénosides


Panax ginseng est une plante qui renferme de nombreux composants actifs et principalement des ginsénosides. Ce sont des glycosides triterpéniques tétracycliques, également appelés saponines.(4)(10)


Actuellement, les scientifiques ont répertorié plus de 100 types de ginsénosides qu’ils séparent en trois types selon les structures glycosidiques : dammarane, acide oléanolique et ocotillol.(4) Parmi le type dammarane, il y a deux sous-groupes : le premier groupe 20 (S)-protopanaxadiol comprend les ginsénosides Rb1, Rb2, Rb3, Rc, Rh2, K, Rg3 puis le second groupe 20(S)-protopanaxatriol regroupe les ginsénosides Re, Rf, Rg1 et Rg. (6)(8)


Ces molécules sont largement utilisées en phytothérapie, et de nombreuses études démontrent qu’elles sont anti-inflammatoires, neuroprotectrices, favorisent la croissance de la neurite, améliorent la mémoire, atténuent les troubles cognitifs, améliorent les symptômes comportementaux chez l'homme etc. (4)(6)(8)(10)(11)


Ces actions biologiques seraient induites par les ginsénosides Rg, Rb et Re qui représentent les molécules actives les plus abondantes du ginseng.(10)(12) De nombreuses études ont cherché à démontrer l’effet spécifique du ginsénoside Re sur les fonctions cognitives.

II. Le ginsénoside Re


Le ginsénoside Re est le principal ginsénoside du Panax ginseng (0,10%) puisqu’il représente entre 23 et 26% du total des saponines. Il est abondamment retrouvé dans les feuilles, les tiges, les bourgeons de fleurs, les baies et les racines de Panax ginseng. (6)(8)(12)


Il s’agit d’un glycoside triterpénique tétracyclique appartenant au sous-groupe 20(S)-protopanaxatriol. Sa structure chimique représentée en figure 1 montre son pouvoir hydrosoluble avec ses nombreuses fonctions hydroxyles.


Figure 1 : Représentation du ginsénoside Re (13)

Figure de la structure chimique du Ginsénoside Re
Figure de la structure chimique du Ginsénoside Re

Les études pharmacocinétiques et métaboliques sur le ginsénoside Re ont démontré que l'absorption de Re est rapide dans le tractus gastro-intestinal. Il est ensuite hydrolysé par les fluides gastriques en Rg2, puis converti dans l’intestin en Rh1 par élimination du rhamnose par le microbiote intestinal. (8).

Il est métabolisé principalement en Rh 1 et F 1 par la microflore intestinale avant absorption dans le sang, puis est rapidement éliminé du corps. (6)(8)(11).


La biodisponibilité orale du ginsénoside Re est de 0,19 à 0,28%, ce qui est relativement faible. (8)


D’après la littérature scientifique, le ginsénoside Re présente de multiples activités pharmacologiques via différents mécanismes.(6)(14).

Il est supposé qu’il a des effets anti-oxydants, neurorégulateurs, anti-inflammatoires, antinéoplasiques et néphroprotecteurs. (13)(14)


SES MÉCANISMES D'ACTIONS SUR LES FONCTIONS COGNITIVES

I. Le fonctionnement neuronal


Le cerveau possède des milliards de neurones qui transmettent l’information à d’autres cellules (neuronales, musculaires, glandulaire). Lorsque les neurones reçoivent un influx nerveux et envoient des messages, ils transmettent des impulsions électriques le long de l’axone, ce qui va libérer des neurotransmetteurs qui sont les messagers chimiques du cerveau. Les cellules cibles reconnaissent spécifiquement ces neurotransmetteurs ce qui va aboutir à une réponse de la cellule : contraction d’un muscle, activation d’une activité enzymatique…(15)(16)

Ainsi, les neurones sont indispensables pour assurer les fonctions cognitives.


Pour protéger l’altération des neurones lors de troubles cognitifs, les microglies interviennent dans le cerveau et la moelle épinière pour éliminer les molécules toxiques. Elles ont un rôle majeur dans la défense immunitaire et l’homéostasie du système nerveux central. Cependant, lors de pathologies neurologiques, il y a un état inflammatoire qui va suractiver les cellules de la microglie et conduire à la formation d’espèces réactives à l’oxygène, de cytokines et de chimiokines. En trop grande quantité, ces molécules peuvent causer la mort cellulaire neuronale et des lésions cérébrales (Figure 2). Cela peut aboutir à la progression des maladies neurodégénératives et un déclin cognitif. (17)(18)(19)


Il est intéressant de voir si le ginsénoside Re intervient sur les molécules impliquées dans les troubles cognitifs.


Figure 2 : Rôle des microglies sur les neurones

Illustration du rôle des microglies sur les neurones
Rôle des microglies sur les neurones

II. Le ginsénoside Re réduit l’expression des molécules inflammatoires


Une étude in vitro a été menée sur des microglies ayant reçu une quantité de LPS pour mimer un modèle inflammatoire retrouvé chez des patients atteints de troubles cognitifs. Il est montré que le ginsénoside Re a inhibé la sécrétion des molécules inflammatoires induites par le LPS via la diminution de la sécrétion d’IL-6, de TNF-α et de NO (figure 3 A).


L'IL-6 et le TNF-α sont des cytokines pro-inflammatoires, qui sont connues pour être impliquées dans la pathogenèse de diverses maladies liées à l'inflammation. De plus, Re a diminué le niveau d’expression des protéines iNOS et COX-2 qui participent à l’état d’inflammation des cellules (figure 3). La figure 3A nous montre que le ginsénoside Re n’endommage pas les cellules. (17)


Graphiques montrant l’effet du ginsénoside Re sur les médiateurs de l’inflammation
Résultats d’une étude sur l’effet du ginsénoside Re sur les médiateurs de l’inflammation.

Figure 3 : Résultats d’une étude sur l’effet du ginsénoside Re sur les médiateurs de l’inflammation. (17)


Cette même étude a démontré que le ginsénoside Re inhibe la translocation nucléaire de NF-κB induite par le LPS en empêchant la phosphorylation et la dégradation de l’IκB-α. (17)


Nous rappelons que NF-κB est un facteur de transcription majeur qui permet l’expression de nombreux gènes pro-inflammatoires. Ainsi, le ginsénoside Re peut contribuer à la réduction des marqueurs de l’inflammation. (8)(17)(20)


III. Le ginsénoside Re possède une activité antioxydante


Les espèces réactives à l’oxygène (ROS) dans le cerveau sont impliquées dans le développement de lésions neuronales oxydatives et la progression des maladies neurodégénératives. Ainsi, des quantités élevées de NO produites par iNOS dans les cellules microgliales activées peuvent endommager les cellules neuronales et conduire à la neurodégénérescence. De plus, NO réagit avec le superoxyde pour produire de la peroxynitrite, qui est un puissant oxydant et un puissant inducteur de la mort cellulaire.


D’autres études confirment le pouvoir antioxydant du ginsénoside Re, avec une diminution des ROS, et ainsi une réduction des risques de troubles cognitifs ou de l’avancée des pathologiques neurocognitives. (8)(17)(19)(20)


IV. Les autres mécanismes d'action étudiés


a. Régulation du complexe IV mitochondrial


Dans la littérature, il est indiqué qu’un patient atteint de la maladie d’Alzheimer présente une carence du complexe IV, une enzyme de la chaine respiratoire mitochondriale également nommée COX. Cela suggère que ce déficit peut être en lien avec cette maladie. (21)


Une étude a montré que le ginsénoside Re intervient sur ce complexe IV. Les résultats démontrent qu’une concentration optimale de ginsénoside Re permet l’activation de la signalisation de NO qui permet la régulation à la hausse de l’activité du complexe IV. (21)(22)


b. Régulation de l’expression de Bcl-2, Bax et iNOS.


Chez des souris dont la maladie de Parkinson a été induite, l’administration du ginsénoside Re a limité l’apoptose des cellules neuronales.

Ce constat est intéressant lorsqu’il est connu qu’il y a une perte neuronale lors de troubles cognitifs. Le mécanisme d’inhibition de l’apoptose des neurones serait attribuable à une régulation de l’expression de la protéine Bcl-2, de Bax et de iNOS. Ces molécules régulent l’apoptose. (23)


c. Régulation de la neurotransmission cholinergique


Une étude a été réalisée pour déterminer l’action des ginsénosides sur la transmission cholinergique. En effet, cette transmission est affaiblie chez des patients atteints de troubles cognitifs. Les chercheurs ont montré que les ginsénosides Re et Rd induisent l’expression des gènes de la ChAT/VAChT dans les cellules neuronales ainsi qu’une augmentation de l’acétylcholine. (7)(24)

Ainsi, Re et Rd peuvent réguler l’expression des marqueurs cholinergiques, ce qui peut contrer les symptômes et la progression de la maladie d’Alzheimer. (24)


DISCUSSION & CONCLUSION


Le ginseng est une plante aux multiples vertus. Ces propriétés proviennent des molécules actives du ginseng : les ginsénosides.

Très étudié, le ginsénoside Re fait partie des saponines les plus abondants dans le Panax ginseng. Il présente un éventail d’activité thérapeutiques et biologiques, avec notamment des effets neuroprotecteurs intéressants. (25)


Le fonctionnement neuronal chez l’Homme est complexe, et son état dépend de nombreux facteurs comme l’âge, l’activité physique et intellectuelle, l’éducation ou encore les conditions environnementales et sociales.

La dégradation des fonctions cognitives est multifactorielle bien que des hypothèses ont été émises par de nombreux scientifiques en se basant sur les différences biochimiques entre des individus sains et ceux atteints de troubles neurodégénératifs. De nombreux traitements naturels, en particulier le ginseng, ont été étudiés par les scientifiques pour vérifier leur efficacité.


Dans la littérature, les mécanismes d’action du ginsénoside Re (molécule active du ginseng) sur les fonctions cognitives ne sont pas encore bien établit. Toutefois, de nombreuses études ont démontré l’activité antioxydante et anti-inflammatoire du ginsénoside Re via la diminution des espèces réactives à l’oxygène et des marqueurs de l’inflammation. (8)(17)(20)

Par ailleurs, il peut intervenir dans la régulation de la transmission cholinergique, la régulation du complexe IV mitochondrial et la régulation des facteurs pro et anti-apoptotiques. Ces actions favorisent le ralentissement des troubles neurologiques et peut conduire à l’amélioration des fonctions cognitives. (8)(17)(19)(20)(21)(22)(23)(24)


Au travers ces différentes actions, le ginsénoside Re est prometteur pour ralentir l’apparition de trouble cognitif ou l’avancée de pathologies neurodégénératives. Toutefois, encore peu d’études scientifiques se sont penchées sur l’efficacité du ginsénoside Re pour améliorer les fonctions cognitives chez des individus sains. Il serait intéressant de voir les résultats puisque plusieurs études ont montré qu'en raison de sa faible biodisponibilité après absorption orale, son effet thérapeutique est faible. Par conséquent, des études pharmacocinétiques approfondies du Re doivent être réalisées afin de vérifier les données scientifiques actuelles. (19)


BIBLIOGRAPHIE

1. Minutolo, C. Les principales fonctions cognitives. 9 (2021).

2. AQNP. Les fonctions cognitives. Association québécoise des neuropsychologues https://aqnp.ca/la-neuropsychologie/les-fonctions-cognitives/.

3. Carcaillon-Bentata, L. Troubles neurocognitifs majeurs : états des lieux épidémiologique. Santé publique France (2019).

4. Feng, H. et al. Ginsenoside and Its Therapeutic Potential for Cognitive Impairment. Biomolecules12, 1310 (2022).

5. Lü, J.-M., Yao, Q. & Chen, C. Ginseng compounds: an update on their molecular mechanisms and medical applications. Curr Vasc Pharmacol 7, 293–302 (2009).

6. Peng, D. et al. Ginsenoside Re: Its chemistry, metabolism and pharmacokinetics. Chin Med 7, 2 (2012).

7. Shi, J., Xue, W., Zhao, W. & Li, K. Pharmacokinetics and dopamine/acetylcholine releasing effects of ginsenoside Re in hippocampus and mPFC of freely moving rats. Acta Pharmacol Sin 34, 214–220 (2013).

8. Gao, X.-Y. et al. Pharmacological Properties of Ginsenoside Re. Frontiers in Pharmacology 13, (2022).

9. Mancuso, C. & Santangelo, R. Panax ginseng and Panax quinquefolius : From pharmacology to toxicology. Food and Chemical Toxicology 107, 362–372 (2017).

10. Sheng, C. et al. The impact of ginsenosides on cognitive deficits in experimental animal studies of Alzheimer’s disease: a systematic review. BMC Complement Altern Med 15, 386 (2015).

11. Sng, K. S. et al. Ginseng extract and ginsenosides improve neurological function and promote antioxidant effects in rats with spinal cord injury: A meta-analysis and systematic review. Journal of Ginseng Research 46, 11–22 (2022).

12. Hu, B.-Y. et al. Treatment with ginseng total saponins improves the neurorestoration of rat after traumatic brain injury. Journal of Ethnopharmacology 155, 1243–1255 (2014).

13. National Center for Biotechnology Information. Ginsenoside Re. PubChem https://pubchem.ncbi.nlm.nih.gov/compound/441921 (2022).

14. Liu, L., Huang, J., Hu, X., Li, K. & Sun, C. Simultaneous determination of ginsenoside (G-Re, G-Rg1, G-Rg2, G-F1, G-Rh1) and protopanaxatriol in human plasma and urine by LC–MS/MS and its application in a pharmacokinetics study of G-Re in volunteers. Journal of Chromatography B879, 2011–2017 (2011).

15. Fédération pour la recherche sur le cerveau. Le neurone. Fédération pour la Recherche sur le Cerveau (FRC) https://www.frcneurodon.org/comprendre-le-cerveau/a-la-decouverte-du-cerveau/le-neurone/.

16. Zarneshan, S. N., Fakhri, S. & Khan, H. Targeting Akt/CREB/BDNF signaling pathway by ginsenosides in neurodegenerative diseases: A mechanistic approach. Pharmacological Research 177, 106099 (2022).

17. Madhi, I., Kim, J.-H., Shin, J. E. & Kim, Y. Ginsenoside Re exhibits neuroprotective effects by inhibiting neuroinflammation via CAMK/MAPK/NF‑κB signaling in microglia. Mol Med Rep 24, 698 (2021).

18. Baker, D. J. & Petersen, R. C. Cellular senescence in brain aging and neurodegenerative diseases: evidence and perspectives. Journal of Clinical Investigation128, 1208–1216 (2018).

19. Tu, T.-H. T. et al. Ginsenoside Re Protects Trimethyltin-Induced Neurotoxicity via Activation of IL-6-Mediated Phosphoinositol 3-Kinase/Akt Signaling in Mice. Neurochem Res 42, 3125–3139 (2017).

20. Zhang, X. et al. Ginsenoside Rd and ginsenoside Re offer neuroprotection in a novel model of Parkinson’s disease. Am J Neurodegener Dis 5, 52–61 (2016).

21. Kim, K.-H. et al. Rescue of PINK1 Protein Null-specific Mitochondrial Complex IV Deficits by Ginsenoside Re Activation of Nitric Oxide Signaling. Journal of Biological Chemistry 287, 44109–44120 (2012).

22. Shin, E.-J. et al. Ginsenoside Re Rescues Methamphetamine-Induced Oxidative Damage, Mitochondrial Dysfunction, Microglial Activation, and Dopaminergic Degeneration by Inhibiting the Protein Kinase Cδ Gene. Mol Neurobiol 49, 1400–1421 (2014).

23. Xu, B.-B. et al. Possible mechanisms of the protection of ginsenoside Re against MPTP-induced apoptosis in substantia nigra neurons of Parkinson’s disease mouse model. Journal of Asian Natural Products Research 7, 215–224 (2005).

24. Kim, M. S. et al. Ginsenoside Re and Rd Enhance the Expression of Cholinergic Markers and Neuronal Differentiation in Neuro-2a Cells. Biological & Pharmaceutical Bulletin 37, 826–833 (2014).

25. Cai, J. et al. A comprehensive system review of pharmacological effects and relative mechanisms of Ginsenoside Re: Recent advances and future perspectives. Phytomedicine 102, 154119 (2022).




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